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Activités \ Improvisation

Urban Pipes

En 2007, j’avais présenté mon utopie : faire de la cornemuse un instrument universel.
C’est à dire imaginer une musique pour cornemuse solo qui n’évoque pas son origine culturelle. Ou encore et surtout, imaginer une musique qui ne soit que de la musique, qu’elle n’ait aucune autre fonction que celle d’être écoutée.

 

Depuis, j’ai admis mon incapacité à atteindre ce but car ma culture originelle, la tradition sonnée en Bretagne, m’influence même quand je cherche à m’en extraire. J’ai choisi de l’assumer et d’affirmer ce qui, pour moi, la caractérise : la projection du son, sa densité, l’énergie du sonneur, la mélodie. Tout en gardant ce qui symbolisait le travail du premier opus : « une modification de modes jeux traditionnels, un travail sur l’utilisation sonore de la cornemuse et son étrangeté harmonique, quittant la pratique strictement mélodique. »

Urban Pipes II est né de cette dualité, pour imaginer une musique qui joue ou se joue de la mélodie, oscille du plein jeu au son éolien, furieuse puis apaisante…

Dans le disque Urban Pipes II sont aussi présents aussi deux duos : avec Guénolé, mon frère, à la trélombarde et avec Beñat Achiary, au chant. Ils révèlent une autre dualité : l’écriture et l’improvisation.

Mélodique ou non, écrit ou improvisé, Urban Pipes donne à entendre ce que peut-être un musicien traditionnel aujourd’hui : respectueux de son héritage et en recherche de nouvelle musique.

Erwan Keravec traite l’improvisation en plasticien du son, comme on traiterait les valeurs de noir d’un monochrome par le striage, le rythme et l’accroche de la lumière.

Jazz Magazine (mai 2011)

Voici une belle expérience, et qui prouve une fois de plus que la musique est une affaire d’ouverture et de croisements. Et cela nous vient de Bretagne, la musique celtique ayant cultivée depuis des années l’art des hybridations et des tentatives en tous genres pour élargir son horizon, sans jamais y perdre son identité, bien au contraire.
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Il s’avère intéressant de découvrir la cornemuse dans de tels contextes, si peu courants. On connaissait le goût de Erwan K. pour les aventures en tous genres, entre sa participation aux Niou Bardophones, au goût de free, ses duos avec guitares électriques ou trompettes et anches et son espoir de voir la cornemuse croiser la route d’autres instruments, d’autres formes musicales que traditionnelles, son désir d’ouverture. Avec le choix, ici, de la laisser pure, sans traitements électroniques, au plus près de l’instruments.
Un très bel essai, sobre, à la maitrise évidente, non dénué de virtuosité, et présenté avec beaucoup de simplicité.

Revue et Corrigé (juin 2012)

Non, ceci n’est pas une cornemuse. Ou plutôt, n’est plus une cornemuse. Certes, Erwan Keravec joue de l’instrument traditionnel d’origine écossaise adapté au kan ha diskan et à la gwerz, les chants fondamentaux de la musique bretonne. Ou plutôt, il a joué de la tradition bretonne. Mais depuis, le musicien pousse le bourdon un peu plus loin, en commençant notamment ce saut dans l’inconnu, l’improvisation à haut risque. Erwan veut décontextualiser, déraciner son outil de sa connotation locale, de son esthétique convenue pour le projeter dans l’absolu, en se lançant dans un imaginaire improbable. Un désir qui peut en désarçonner beaucoup, tous ceux qui sont à cheval sur les règles de la sonnerie traditionnelle. Cette tradition qui, souvent bien exécutée, donne le tournis. Eh bien, le jeu décoiffant d’Erwan, lui aussi fait tourner la tête.

Akhaba.com